Simone’os de Beauvoir privilegija
Privilege of Simone de Beauvoir
Author(s): Geneviève FraisseSubject(s): Philosophy
Published by: Lietuvos kultūros tyrimų
Keywords: Beauvoir; Sartre; privilège; histoire des femmes.
Summary/Abstract: Il n’y a aucune hésitation, nous sommes d’emblée installés dans l’histoire, l’histoire longue des femmes qui pensent, et l’histoire courte des femmes à la conquête collective du savoir et de toutes les jouissances singulières qui s’y attachent. Tel est le premier „privilège“ de Simone de Beauvoir, celui de s’imaginer dans l’histoire, de plain-pied. Cette affirmation d’appartenir à l’histoire vaut tous les engagements. Cette certitude d’y avoir sa place dépasse et déborde toutes les dénonciations. Le mot de „privilège“ lui est familier, surtout dans les années 1950. Beauvoir titre ainsi trois courts essais, publiés en 1956, elle use de ce terme dès l’introduction du Deuxième Sexe, et il fait partie du vocabulaire existentialiste. Il s’emploie au singulier et au pluriel, il dit le luxe d’une situation, et la limite d’une place individuelle. Le privilège, en latin, énonce la loi, lex, et le privé, le particulier, privum, il formule une loi pour certains, quelques-uns. La loi privée, particulière; exactement le contraire d’une loi générale, universelle. Suivre un seul des parcours de Beauvoir, celui de la constitution du „privilège de la pensée“, et surtout du privilège de cette femme-là, suffira. On se doute, immédiatement, que le terme de privilège n’est jamais employé comme l’image d’une fin, d’un but à atteindre, mais comme celle d’un moyen, instrument dans une situation propre à exer cer sa liberté. Le privilège n’est jamais un donné comme au temps de l’Ancien Régime, un avantage incontesté, il est le résultat d’une conquête, propre à tout être, à l’intérieur de nos démocraties. Et, surtout, le sens politique est limpide: le privilège n’a d’intérêt que s’il est bon pour tous. Beauvoir ne s’empare de son privilège que pour la cause commune. C’est le deuxième sens du mot „privilège“: la loi particulière ne se conserve pas pour un petit groupe, elle est le support d’un projet commun, pour tous. Le privilège est un mot original pour dire le droit et le pouvoir, la capacité et la puissance; il donne aussi l’image d’une tension entre des intérêts divergents. Le mot de privilège prend alors un troisième sens: après l’idée d’avantage singulier et celle de puissance commune, ce mot désigne la difficulté politique. Le privilège est une impasse. Le privilège est une qualité intellectuelle, mais un défaut politique. J’ose ainsi résumer les choses. Alors comment justifier la force du privilège dans la démarche de Beauvoir? Probablement dans sa représentation d’une scène commune pour les deux sexes, d’une seule histoire pour les hommes et les femmes. Elle n’a isolé la femme qui pense que pour mieux reprendre l’histoire commune.
Journal: Athena: filosofijos studijos
- Issue Year: 2010
- Issue No: 6
- Page Range: 14-39
- Page Count: 26
- Language: Lithuanian